Marguerite YOURCENAR, Le coup de grâce

Publié le par Schneeweiss

« On parle toujours comme si les tragédies se passaient dans le vide : elles sont pourtant conditionnées par leur décor. Notre part de bonheur ou de malheur à Kratovicé avait pour cadre ces corridors aux fenêtres bouchées où l'on butait sans cesse, ce salon d'où les Bolcheviks n'avaient emporté qu'une panoplie d'armes chinoises, et où le portrait d'une femme troué d'un coup de baïonnette nous regardait du haut d'un trumeau, comme amusé par cette aventure ; le temps y jouait son rôle par l'offensive impatiemment attendue et par la chance perpétuelle de mourir. »

Du tragique chez les bolcheviques

Dans les pays baltes, "cul-de-sac" de l'Europe de l'Est, alors que la révolution bolchévique bat son plein,  les combattants du front antibolchévique sont stationnés dans un château situé dans la ville de Kratovicé. C'est dans ce lieu qu'une histoire d'amour naît entre Eric von Lhomond, soldat d'origine française ,et Sophie, la soeur du soldat Conrad de Reval. Rien n'est simple et au fil des pages, la haine semble entacher la pureté de l'amour, jusqu'au coup de grâce final...

Plus qu'une simple histoire d'amour, ce court roman nous décrit une lutte passionnelle entre une jeune fille et un soldat qui semble des plus froids en apparence. Tiraillé entre l'amour fraternel et la position d'amant, Eric demeure hésitant voire cruel. Les sentiments évoluent, la proie devient le prédateur ; la camarade devient l'adversaire. Une fin à la fois terrible et sublime clôt l'histoire...


Ma note :

Ce qui m'a plu...
* Le choix de la narration : Eric von Lhomond narre l'histoire, ce qui permet au lecteur de ne pas l'enfermer totalement dans le rôle du bourreau. J'ai même eu envie de gifler Sophie à sa place... :)
* L'évolution troublante du personnage de Sophie, perçue à travers les yeux d'Eric...
* Cette ambiance de camaraderie toujours présente dans le roman rend les personnages attachants et témoigne de la dureté des événements historiques dans lesquels se déroule l'histoire.
* Une fin intelligente et poignante.

J'ai moins aimé...
* Quelques passages un peu trop descriptifs sur les sentiments amoureux...
* La 4e de couverture parle d'un "triangle amoureux", alors que le troisième membre, Conrad, le frère de Sophie, reste très en retrait.
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D
<br /> Merci pour cet article !<br /> Je suis bien d'accord avec vous sur l'expression de triangle amoureux, non justifiée.<br /> En revanche, je comprends cette relation si fragile entre Eric et Sophie non pas comme un amour rongé par la haine, mais plutot comme un amour si evident et si facile qu'il est remplacé par de la<br /> haine. Les protagonistes s'aiment tellement, que le jeux de l'amour les lasse et ils preferent s'adonner a des jeux plus cruels tel la haine et le mepris. Peut etre un peu afin d'explorer les<br /> limites sentimentales de l'autre (?). Ainsi tous les autres personnages ne sont ils que des figurants mettant en valeur cette relation si particuliere et si intime.<br /> J'ai beaucoup aimé l'utilisation du décor et cette mise en scene si théatrale de cet amour.<br /> Une tres belle hsitoire, et un grand livre sans aucun doute !<br /> <br /> <br />
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